Les règles de X interdisent de glorifier la violence. C'est une interdiction générale que X a parfois utilisée pour supprimer des contenus et des comptes pronazis. Les règles interdisent également de faire l'éloge d'entités violentes et précisent que la plateforme appliquera des étiquettes aux images haineuses telles que les croix gammées. Mais le rapport, publié par NBC News, estime que X ne semble pas appliquer ces règles de manière cohérente. Le rapport indique qu'au moins 150 comptent d'abonnés X Premium et des milliers de comptes non payants ont publié ou amplifié des contenus pronazis sur X au cours des derniers mois.
Les comptes payants qui ont publié le contenu ont tous systématiquement publié des documents antisémites ou pronazis. Le rapport indique également que le contenu pronazi n'est pas confiné à la périphérie de la plateforme. Il cite un cas particulier pour illustrer cette observation. Au cours d'une période de sept jours en mars dernier, sept des messages pronazis les plus partagés sur X ont été vus 4,5 millions de fois. L'un d'entre eux, avec 1,9 million de vues, faisait la promotion d'une théorie du complot fausse et démentie depuis longtemps, selon laquelle l'Holocauste n'a pas causé la mort d'au moins six millions de Juifs.
Plus de 5 300 comptes vérifiés et non vérifiés ont repartagé ce message, et d'autres messages populaires ont été repartagés des centaines de fois chacun. Il s'agit de la dernière preuve en date de l'existence d'un réseau nazi florissant sur X sous l'égide de Musk. Des enquêtes antérieures menées par d'autres organisations ont mis en évidence de nombreux exemples d'antisémitisme, de suprématie de la race blanche et de soutien au nazisme sur X. Selon le cabinet d'études Sensor Tower, X comptait 174 millions d'utilisateurs actifs quotidiens dans le monde sur son application mobile en février. X prétend en avoir beaucoup plus.
Un grand nombre des 150 comptes payants ont placé sur leur profil X des liens renvoyant vers leurs sites Web, leurs livres et d'autres médias, où ils prônent parfois le nazisme et l'antisémitisme. L'un de ces comptes, qui utilise le nom "The Impartial Truth", publie des contenus de propagande nazie recyclés et remixés, et son profil X renvoie à un site de dons. L'un des comptes payants appartient à Stew Peters, animateur d'un talk-show sur Internet basé en Floride, qui a fait l'éloge des autodafés nazis dans l'Allemagne des années 1930. Il a publié en mars un message, devenu viral avec 1,9 million de vues, qui niait l'Holocauste.
Peters compte plus de 574 000 abonnés sur X, où ses messages sont souvent antisémites, et son compte renvoie à son site Web, où les vidéos sont facturées 10 dollars par mois. En réponse à une demande de commentaire, Peters a déclaré que "NBC News utilisait des arguments ad hominem pour créer des récits de toutes pièces". Certains des comptes qui diffusent de la propagande nazie n'hésitent pas à faire l'éloge des nazis. L'un d'entre eux a déclaré avoir utilisé l'intelligence artificielle pour générer une fausse voix du nazi Joseph Goebbels qui lisait ses écrits à haute voix. La publication a été visionnée plus de 23 000 fois.
Le rapport allègue que X fait sortir les sympathisants de l'idéologie nazie des coins sombres d'Internet et les amène sur une plateforme massive où ils peuvent payer pour amplifier leur contenu. « Un cadre accueillant sur les réseaux sociaux peut donner aux sympathisants nazis le sentiment d'être validés dans leurs opinions et de recruter d'autres personnes pour leur cause. Pour ceux qui sont déjà animés par la haine, il s'agit d'une grande étreinte chaleureuse », a déclaré Patrick Riccards, directeur de Life After Hate, une organisation basée à Milwaukee, qui aide les gens à se désengager des groupes extrémistes violents.
De nombreux experts appellent Musk à changer de stratégie quant à la modération sur X. Selon Riccards, la haine en ligne peut également contribuer à la violence hors ligne. Il cite en exemple le massacre raciste dans une épicerie de Buffalo, dans l'État de New York, où 10 Noirs ont trouvé la mort en 2022. Le tireur a publié une sorte de manifeste en ligne et a écrit dans un document qu'il soutenait le néonazisme. Le tireur a ensuite déclaré au tribunal qu'il croyait ce qu'il lisait en ligne et qu'il mettait sa haine en pratique. Riccards affirme : « ils veulent trouver des individus capables d'agir physiquement le moment venu ».
Selon Megan Squire, directrice adjointe chargée de l'analyse des données Southern Poverty Law Center, un groupe de lutte contre la haine fondé en 1971, dans la plupart des cas, le matériel nazi sur X vise à répandre la haine. « Ce n'est pas comme si des historiens y parlaient des discours d'Hitler », a-t-elle déclaré. Squire a indiqué qu'au cours de ses recherches, elle avait constaté que les comptes affichant des documents nazis étaient gérés par "des groupes connus de suprémacistes blancs qui tentent de normaliser leurs idées, de gagner des adeptes et de transférer ces adeptes sur d'autres plateformes ailleurs en ligne".
En n'agissant pas contre de nombreux comptes pronazis, X continue à tirer des revenus de leur activité d'au moins deux façons : en percevant des frais d'abonnement mensuels de la part de ceux qui publient des contenus pronazis et en diffusant des publicités sur ces comptes ou à côté des contenus pronazis. L'examen a identifié des publicités sur 74 des 150 comptes payants, soit sur leurs pages de profil, soit dans les réponses sous leurs messages. Selon le rapport, parmi les annonceurs figuraient des groupes tels SiriusXM, The Hollywood Reporter et Splunk, une filiale du fournisseur de matériels informatiques Cisco.
Depuis que Musk a racheté Twitter en 2022, l'entreprise a perdu plusieurs de ses plus gros annonceurs et Musk a été critiqué pour certaines de ses publications sur le site, dont une dans laquelle il a semblé donner un coup de pouce à une publication promouvant la théorie du complot du "grand remplacement", communément répandue par les suprémacistes blancs. Le gestionnaire d'actif Fidelity a revu à la baisse la valeur de sa participation dans l'entreprise de médias sociaux de Musk le mois dernier. Fidelity a suggéré que son évaluation de X a chuté de 73 % depuis que Musk a acheté la plateforme pour 44 milliards de dollars.
La monétisation des contenus promouvant le nazisme contredit l'une des premières promesses de Musk après qu'il a acheté l'application, alors connue sous le nom de Twitter, en octobre 2022. « Les tweets négatifs et haineux seront totalement désamorcés et démonétisés, ce qui signifie que Twitter ne recevra aucune publicité ni aucun autre revenu », avait-il écrit dans un message publié en novembre 2022. Musk a également déclaré à l'époque que personne n'avait le droit d'être amplifié en ligne. « La nouvelle politique de Twitter, c'est la liberté d'expression, mais pas la liberté d'accès », avait-il annoncé à son arrivée.
Les représentants de X n'ont pas répondu aux questions écrites et n'ont pas accepté d'interview, mais ils ont envoyé un lien vers un article de blogue datant de septembre 2023 qui indique que X a une "approche de tolérance zéro" à l'égard des discours violents. De nombreux chercheurs se sont plaints qu'il est désormais difficile, voire impossible, de mesurer la portée de l'extrémisme sur X en raison des nouvelles restrictions imposées par Musk. « Il s'agit de la sécurité par l'obscurité : faire en sorte qu'il soit vraiment difficile pour les gens de voir le problème, et ensuite vous pouvez prétendre qu'il n'existe pas », affirme Squire.
Plutôt que de sévir contre les messages antisémites, Musk a promu lui-même des théories du complot antisémites. L'année dernière, il a adopté le concept du "grand remplacement", selon lequel il existe un complot visant à remplacer la population blanche par des personnes non blanches. Ses messages sur le sujet ont été condamnés par la Maison Blanche et ont entraîné un exode des annonceurs. À la suite des réactions suscitées par ses déclarations, Musk s'est rendu en Israël et ensuite en Pologne pour visiter le site de l'ancien camp de concentration d'Auschwitz en compagnie du journaliste conservateur Ben Shapiro.
Le mois dernier, Musk a admis que ses publications erratiques ont considérablement nui aux résultats financiers de l'entreprise. Les confessions du milliardaire sont intervenues lors d'une déposition humiliante en mars que son avocat a tenté en vain de garder secrète. La déposition révèle à quel point Musk n'a cessé de se saboter lui-même et de saboter le réseau social qu'il a pourtant acquis pour 44 milliards de dollars. Un délire de mégalomane ? Il fait face à un procès en diffamation, mais a défendu lors de son audition la liberté d'expression sur X et a qualifié la plateforme de l'endroit le plus véridique sur Internet.
Musk a également rétabli les comptes d'Andrew Anglin et de Nick Fuentes, deux éminents néonazis. Tous deux sont désormais suspendus, bien que des vidéos dans lesquelles Fuentes remet en question l'Holocauste soient toujours largement diffusées sur X. L'année dernière, l'organisme de surveillance progressiste Media Matters a publié un rapport indiquant que des contenus nazis étaient diffusés sur X en même temps que des publicités de grandes entreprises.
X a poursuivi Media Matters en justice, affirmant que ses recherches étaient faussées parce qu'elles utilisaient un compte qui, selon l'entreprise, était prédisposé à voir des contenus nazis sur la base des comptes qu'il suivait. Selon X, que le groupe avait obtenu des résultats erronés parce que l'activité de ses chercheurs était atypique, par exemple en rafraîchissant une page plusieurs fois pour voir quelles publicités apparaissaient. L'action en justice de X est en cours.
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